Bleed for that sword. || Ft. L'abruti

Je sais que c'est un jeu stupide et puéril, une attitude enfantine complètement ridicule, une compétition qui n'a pas lieu d'être. Je sais que c'est bien loin d'être ce qu'on voudrait normalement que ce soit, que la pression de je ne sais quoi semble me pousser en cette direction. Comme si je craignais quelque chose si je n'arrivais à me contraindre à cette attitude que j'avais pourtant délaissé il y a tant d'années. Comme si c'est la seule façon que j'avais de me protéger d'un mur quelconque face à une fatalité quelconque, n'arrivant pas à mette plus de mots sur la chose. Je n'ai jamais été très doué pour ça de toute façon, les mots. Je ne me suis pas tourné vers le dessin sans raison, mais le dessin ne m'aidera pas en ce moment, en cet instant où les actions parlent d'elles-même. Où le brusque de mon attitude et ma hâte ne servent qu'à masquer ma crainte profonde et la rapidité avec laquelle tout ceci aurait pu s'écourter s'il avait continué. Chose que je n'avais pas les couilles de dire bien évidemment, bien plus enclin à faire tendre ses pensées... et autre chose... vers une nouvelle occupation. J'essayais donc de m'appliquer du mieux que je le pouvais du haut de ma non expérience de la chose. Ça ne devait pas être si difficile après tout. Du moins, c'est ce que j'ai présumé jusqu'à ce que je le sente si brusquement échappé à mes lèvres en s'excusant. Et si je n'y arrivais pas du tout? Et si son corps ainsi tendu contre mes doigts le tenant doucement avait été synonyme de désagrément ou de douleur bien plus que de plaisir face à tout ceci. Et si... Et si je le laissais parler avant de penser n'importe quoi et entacher de moi-même mon petit orgueil mal placé?

Je hausse simplement un sourcil face à ses excuses répétitives, essayant de m'asseoir plus confortablement en déglutissant légèrement. Mouvement semblant presque le faire paniquer à le sentir ainsi poser sa main dans mon cou puis contre ma mâchoire. Qu'est-ce qui se passe!? Aller crache le morceau du con avant que profite de la brèche pour prendre la porte et miner que je suis en colère alors que je ne le suis en rien. Plutôt... partiellement soulagé de cette pause même si ça je ne vais pas l'avouer. Pas comme il en vient finalement à avouer qu'il n'a pas fait tout ça depuis... depuis quoi? Depuis qu'il n'arrive plus à marcher? Ajouter tant qu'il peut plus dehors... et... et je soupire. Sentant l'expression de mon visage passer bien rapidement de l'agacement à la compréhension. Mes traits durcis de ma stupidité s'adoucissant sans avoir besoin d'explications plus détaillées. Ce que je peux être un pauvre con.

Je reste silencieux un moment, le fixant là où il évite visiblement mon regard. Cherchant les mots que je n'ai pas à chercher pour le rassurer. Ayant simplement besoin de cracher le morceau à mon tour pour nous mettre sur un semblant de pied d'égalité. Même si, contrairement à ce qu'il semble laisser sous-entendre, je peux encore... « Si tu n'avais pas arrêté j'aurais... fini trop vite. Je n'ai rien fait depuis... depuis l'accident en fait. » Je me frotte la nuque puis pose mes mains contre ses épaules en soupirant. « Je suis désolé d'agir comme un con... Ça a tristement toujours été mon mécanisme de défense et tout ça c'est... Je n'ai jamais rien fait avec un mec alors je peux t'assurer que je suis un fier partisan de la lenteur dans la présente situation... » Que je dis enfin en lui frottant les épaules, comme si ça pouvait le réconforter. Je sens plutôt le malaise que je ne veux pas voir s'installer, sachant pertinemment que dans ce cas je ne me ferais pas prier pour me sauver. Alors je l'attrape par le menton pour lui relever la tête et poser mes lèvres contre les siennes, ma seconde main se glissant entre ses cuisses pour le caresser d'une douceur que je n'ai jamais réellement laisser transparaître. « Alors on va y aller doucement d'accord. Ce n'est que nous et... dans le pire de la situation on aura de quoi se marrer après coup. Ça te donnera une raison de m'envoyer des sms à une heure pas possible alors que j'essaie de dormir. »

Si tu n'avais pas arrêté j'aurais... fini trop vite. Je n'ai rien fait depuis... depuis l'accident en fait. - Quoi? Lui aussi? Je rougis, néanmoins soulagé, mais également gêné. Pourquoi? Parce qu'en fin de compte, ça n'arrive pas qu'à moi? Gêné par ma propre honte finalement inutile, ou tout du moins partagée? S'il agit comme un con, je ne peux nier être un peu trop guidé par ma propre fierté, malgré le fait de savoir quelle plaie cette chose peut être. Il n'a jamais rien fait avec un mec? Il paraissait tellement sûr de lui... Peut-être cherchait-il à compenser? Je n'y avais vu que du feu.

Lorsqu'il relève mon menton pour déposer ses lèvres sur les miennes, je souris, comme plus léger. Comme si une pression intense venait de s'envoler. - Alors on va y aller doucement d'accord. Ce n'est que nous et... dans le pire de la situation on aura de quoi se marrer après coup. Ça te donnera une raison de m'envoyer des sms à une heure pas possible alors que j'essaie de dormir. - Si je ne viens pas en personne délivrer le message... - Dis-je, joueur, sentant sa main entre mes cuisses. Se marrer après coup... Venant de n'importe qui d'autre, j'y aurais vu de la pitié, mais s'il est dans le même cas que moi... Que devrions-nous faire? En pleurer? Arrêter là par peur de cette honte que je tente de chasser de mon esprit? Si nous sommes tout deux dans la même situation, c'est une raison de plus de continuer.

Plus doux, plus patient également, je place mes mains sur ses hanches et l'invite à s'asseoir sur mes genoux, ses jambes de part et d'autres des miennes. Je suis forcé de lever légèrement la tête pour pouvoir scruter son visage si proche du mien et un sourire se glisse sur mes lèvres avant qu'elles aillent embrasser les siennes. - Ce n'est pas la première fois pour moi, alors promis, je vais bien m'occuper de toi. - Et puis n'est-ce pas ma responsabilité, en tant que partie d'expérience, de me montrer plus doux? Plus compréhensif également? De le guider un peu?
Glissant ma main dans ses cheveux, j'attire son visage contre le mien à nouveau et l'embrasse encore. Cette fois, contrairement à dans le bassin, le baiser est plus langoureux, moins brutal, non sans une certaine dose de passion malgré tout. Je ne dévore pas ses lèvres, je les déguste. Analogie douteuse? Peu importe, elles sont délicieuses.

Je ne l'aurais jamais pensé, mais j'apprécie ce moment. J'aime ce que nous faisons. Et dire qu'au début, je lui aurais fais bouffer des murs, maintenant je ne désire que le frisson de son corps contre le mien, la chaleur de son désir comme seule récompense. Mon autre main se perd dans son dos, qui me fait toujours mourir, et l'absence de hâte, de sauvagerie, rend l'expérience bien plus supportable. Il n'était pas dans mes habitudes de me montrer particulièrement doux. J'ai toujours été un peu brusque, mais j'aimais ça. Mais coincé dans cette situation sans avoir vraiment le choix, du moins pour l'instant, j'y trouve quelque chose de plutôt plaisant. Un compromis agréable alors que, m'allongeant en arrière, les jambes toujours repliées au bord de la banquette, je l'invite à m’imiter, à me couvrir de son corps.
Il a raison, nous avons le temps. Il n'y a que nous. Et puis si nous brûlons la mèche un peu trop vite... Qui nous empêche de remettre ça?

Le regard que je lui ai lancé était un joyeux mélange de doute, découragement et d'une pointe de cet agacement malsain qu'il continuera sans doute d'engendrer en moi même si, d'une certaine façon, cette discussion a des allures de paix. Il n'en reste pas moins si... convaincu de ce qu'il sait faire cet abruti que semblant de paix ou non, je retiens ardemment le poing que j'aurais souhaité enfoncer dans son joli visage. D'autant plus qu'ainsi placé sur ses genoux j'aurais tout le loisir de le faire, le toisant ainsi de haut alors qu'il croit bon de m'empêcher de répliquer quoi que ce soit en kidnappant ma bouche de la sienne. Plus langoureusement, moins abruptement que nous avons pu le faire au cours des derniers instants. Comme si cette compréhension mutuelle avait suffit à nous placer sur un certain point d'égalité où nous ne ressentons plus le besoin de faire nos preuves. Un juste milieu où nous avons trouvé l'une des rares personnes en cet univers à pouvoir comprendre ne serait-ce qu'un peu la crainte de ce retour à ce qui devrait être la normalité, le retour à ce que nous devons apprendre à apprivoiser de nouveau. Moi plus que lui il semblerait au vu de ses dires, ce qui n'est rien pour réellement me rassurer il faut l'admettre.

Je le laisse néanmoins faire usage de ses mains en mon dos, sa bouche toujours contre la mienne alors il qu'il en vient finalement à se coucher de nouveau. Mouvement que je suis pour me coucher contre lui, l'embrassant à défaut de savoir quoi dire d'autre qu'un nouveau flot de bêtises qui me sembleraient soudainement un peu déplacées. À quoi bon continuer de grogner alors que ça n'apportera rien de plus qu'un bris de ce moment que je dois bien admettre commencer à apprécier. La chaleur de sa peau contre la mienne, la douleur à ma hanche que j'oublie au profit de cette sensation grisante engendrée de tant de proximité, de douceur. Un instant où nous ne semblons pas avancer trop vite et où pourtant je me sentirais presque déjà défaillir tant ceci, juste ceci, suffit à me donner bien plus que je n'ai eu durant des années. Sans doute est-ce également la raison pour laquelle je n'arrive pas à fermer les yeux, détacher mon regard du sien et cette couleur hypnotisante qui l'anime. De peur de me réveiller demain sur cette chaise où je me suppose commencer à moisir dans le vrai monde, de retour à ce monde d'infinie noirceur où je n'aurais pas pu admirer tout... ça.

Alors je profite, laissant mes doigts palper sa chaire, s'y enfoncer, la découvrir et me l'approprier. Sentant son cœur pulser sans doute tout aussi fortement que le mien contre nos torses pressés l'un contre l'autre. Un désir brûlant s'épanchant en mon corps tout entier qu'un simple frôlement arrive à émoustiller de trop, de cette simple appréhension de ce que suivrait. Le sachant trop bien pour y avoir déjà goûté. Et c'est précisément ce qui engendre cette impatience du corps, cette impression qu'on va exploser et cette hâte d'en terminer qu'on sent venir à des kilomètres. Le grand final qu'on va apprécier peu importe le nombre de temps nécessaire pour lui permettre de se manifester.

Quand je m'allonge, quand mon dos s'étale contre le fin matelas, il ne décroche pas une seule seconde ses lèvres des miennes. Son corps m'accompagne, son torse contre le mien, ses jambes toujours enserrant les miennes. Je sens la chaleur qui l'anime, le brûlant de ses chairs contre les miennes. Mes mains se perdent dans son dos alors que je l'embrasse encore, mes lèvres trouvant son cou pour mieux le sentir contre moi.
Pendant que ma main droite presse son torse contre le mien, et que mes dents s'amusent avec douceur avec le lobe de son oreille avant d'embrasser sa gorge, ma main gauche, elle, trouve une prise plus plaisante contre ses fesses.

J'ai l'impression d'être partout à la fois, explorer son corps parfait de plusieurs angles, mais je sais que je ne dois pas me presse. Je sais que je dois prendre mon temps, alors plutôt que de continuer d'appliquer cette pression comme un addict à la chaleur humaine que son corps me prodigue, je nous fais rouler sur le côté.
D'un mouvement, il se retrouve en dessous, étreint de mon corps dont le bassin se presse avec une douceur attentive contre le sien, ses jambes forcées de s'écarter légèrement pour permettre ma présence.
Je l'embrasse une dernière fois avant de me redresser. Il est allongé sur la banquette, je suis debout au bord, et mon bassin s'imbrique avec le sien d'une façon qui me permet de sentir ses cuisses contre mes hanches. J'observe son visage, laisse mon regard éhonté glisser le long de son torse parfaitement sculpté et habillé de quelques poils bruns, sans me rendre compte du sourire satisfait qui anime mon visage ou de la langue avide et gourmande qui passe sur mes lèvres.

Il y a quelque chose d'érotique à pouvoir tenir les seins d'une femme dans ses mains, mais il y a également une sensation tout aussi brûlante à pouvoir poser ses mains à plat contre le torse d'un homme, pouvoir les laisser glisser contre sa peau, sentir les muscles en-dessous et les battements de son corps qui accélère. Il y a quelque chose de grisant à pouvoir arpenter les flancs d'un torse, zone vulnérable et sensible qu'on vous laisse explorer avec confiance. Il y a quelque chose d'amusant à tenir d'une main deux verges pour les presser l'une contre l'autre, voir le regard de l'autre se brouiller alors que vous sentez entre vos doigts le sang brûlant pulser avec force.

N'y tenant plus, je glisse dans ma bouche mon index, l'humidifie d'un peu de salive et l'emporte s'insinuer avec douceur entre les fermes miches de l'abruti. Juste passer. Juste prévenir. Préparer. Juste m'annoncer, avant que s'y presse l'ardeur érigée. Avant de gentiment m'y aventurer. Je lui donne le temps, je me fie à la rougeur de son visage et ses traits qui se modifient pour savoir jusqu'où je peux aller. À quel point je dois m'arrêter. À quel moment ralentir ou accélérer.
Une bonne chose ou une mauvaise chose, quelques minutes seulement s'écoulent avant que mon corps n'abandonne face au choc électrique qui le secoue. Écarlate et couvert de sueur, trop essoufflé pour mon endurance naturelle, je me penche sur lui pour l'embrasser, sacrifiant quelques goulées d'air pour le gout de ses lèvres.

Je me suis retiré juste à temps pour redécorer la blancheur de ses fesses, mais j'ai bien conscience qu'il n'en est pas encore arrivé là. Alors après un dernier baiser et dans un effort visible achevé d'un long soupir, je tombe à genoux et laisse à nouveau ma bouche faire le travail. Puisqu'il m'a permis d'atteindre mon paroxysme, je ne rechignerais pas à lui faire partager le même dénouement, mes lèvres expertes comme outil de délivrance alors qu'entre-elles, je sens déjà les frissons de son corps se faire plus intenses.

Ça y est... C'est tout ce que je me surprends à penser lorsque je le vois ainsi m'observer sans que ce large sourire ne quitte ses lèvres. Lui qui s'est assuré de prendre le dessus de la situation en tous les sens du terme. Mouvant nos masses nues de façon à inverser les rôles et me faire présumer que voilà, le moment que nous avons à peine effleuré va guider ses mouvements et nourrir ma crainte. Puisque crainte il y a oui. Celle de l'inconnu, de la douleur, de la performance même si nous semblions d'accord pour dire que sur ce point nous en étions au même niveau. Un peu rouillés, mais bien trop longuement soustraits à tout ce flots de sensations que nous expérimentons l'un comme l'autre en ces trop brèves minutes. Alors je crains cette finalité brûlant dangereusement nos corps à chaque nouveau contact de ses doigts contre mon torse, contre nos zob pressés l'un contre l'autre à m'en faire frissonner plus que de raison. Ça, simplement ça, suffit à échauffer mes sens d'une façon depuis trop longtemps oubliée. Pressant mon corps tout entier vers ce gouffre me faisant perdre la tête à en faire papillonner mes yeux que je peine à garder ouvert. Jusqu'à ce que je le sente. Jusqu'à ce que je sente ce que je suppose être son doigt s’immiscer en ce dernier rempart n'ayant pas encore été passé. Cette dernière barrière précédent de peu le véritable explorateur du moment ne tardant à se presser là où jamais personne ne s'est aventuré. À m'en faire me crisper, sans doute tout autant rougir de la douleur comme de la gène profonde que la chose génère en moi. Incapable de faire autrement, le corps coincé entre cette surprise qui ne quitte mon visage et ce petit plus que je veux sentir gagner en ampleur. Parce que malgré tout c'est bon, dieu que c'est bon. Jusqu'à la toute dernière seconde où ses lèvres prennent les miennes et je sens la chaleur de sa libération contre le galbe encore un peu crispé de mes fesses. Jusqu'à cet instant où il ne manque de me permettre d'atteindre cet apogée également de la chaleur de sa bouche experte qui n'a besoin que de très peu de temps pour me faire céder. Ce fût bon jusqu'à ce qu'il ne reste que le souvenir de la chose et ce malaise que j'espérais ne pas voir s'installer.

Je l'avais forcé à m'embrasser encore et encore lorsqu'il en eut terminé, fortement incité à profiter avec moi du si faible confort de la surface simplement pour le toucher encore un peu avant qu'on ne retrouve le rythme de nos détestables existences parallèles en ce monde. « On devrait sans doute retourner dans ce grand bassin... » Histoire de laver toute trace de notre méfait et gentiment oublier tout ce qui vient de se passer. Du moins... jusqu'à la potentielle prochaine fois qui en viendra bien à arriver. Pourquoi pas? Pourquoi pas alors qu'on a déjà passé le stade des jeux puérils et des vidéos douteuses. On a très très très largement passé ce stade oui. « Ça ou retourner frapper du gladiateur pour passer le malaise et la frustration. C'est au choix. »

Si chaud. Si brûlant. La chair sensible contre ma langue a une sensation si étrange, comme si un faible courant électrique la parcourait. Je me montre appliqué, patient même si je n'ai pas à attendre bien longtemps. Ma langue se joue du frein, mes lèvres appliquent une pression insupportable de plaisir, et lorsque je vois ses abdos se contracter et que je sens le gland se gorger, je le libère pour qu'à son tour, il puisse profiter. Dans un acte parfaitement sadique et pour stimuler ce plaisir électrisant qui saisit son corps, je reprends en bouche la chair désormais ultra-sensible et m'amuse des secousses de son corps alors que des vagues de sensations entre plaisir et douleur le surprennent, mais je ne fais pas durer le supplice plus longtemps.

Ignorant le fluide sur son torse qui vient se coller au mien, je remonte et me presse contre lui, embrasse ses lèvres avec insistance, puisqu'il semble le vouloir. Lové contre lui, faute de meilleur mot pour le décrire, j'embrasse la ligne parfaitement dessinée de sa mâchoire avant de revenir à ses lèvres avant de reprendre mon souffle, profiter de ce calme. Cette paix si agréable qui suit l'acte. Ce bien-être alors que mon regard ne peut s'empêcher de scruter son corps, ses yeux déjà tournés vers le plafond au-dessus de nous. N'ose-t-il plus me regarder?
Et maintenant que j'y pense, tout ce qui nous caractérise semble remit en perspective et cette position, ma main sur son torse, ma jambe reposant sur les siennes, semble étrangement bizarre. Oui, bizarre. Presque anormale. Pourquoi avoir cédé à cet abruti? Il me sort par les yeux les trois quarts du temps. Et le dernier quart, il n'est simplement pas dans mon environnement immédiat.

On devrait sans doute retourner dans ce grand bassin... - Mon corps se fige à l'idée de quitter le confort chaleureux de notre petite situation. Pourquoi fuir? Pourquoi ne pas profiter du calme? Il bouge et je le laisse se redresser. - Ça ou retourner frapper du gladiateur pour passer le malaise et la frustration. C'est au choix. - Me redressant moi-même, je me glisse dans son dos, les jambes de part et d'autres de ses hanches, et passe mes bras sous les siens pour les serrer contre son torse alors que ma tête vient se poser au creux de son épaule. Moi, personnellement, j'apprécie cette chaleur humaine. Elle m'avait manqué. - T'iras combattre aucun mec huilé avec cette blessure. Tu vas devoir cicatriser d'abord. - Ça ne devrait pas prendre longtemps une fois de retour dans la Zone neutre et avec la bonne médication, mais là, immédiatement, un nouveau tour dans l'arène serait idiot et imprudent.

Suivant le mouvement, je le libère de mon étreinte et le suis jusqu'à l'eau qui paraîtrait froide en comparaison à nos corps encore chauds et humides. Elle lave nos frasques, rafraîchit nos sens et lorsque nous avons terminé, je le ressens, ce silence gêné. Il n'y a pas de raison d'être embarrassé, et pourtant, c'est bien là. Car maintenant que nous avons fait ça, maintenant que nous nous sommes l'un l'autre éprouvés, que reste-t-il? De quoi parler? Si avant aujourd'hui ne nous adressions tout juste la parole que pour nous engueuler, qu'est-ce qui a changé? Qu'est-ce qui peut changer?

Je ne regrette rien, et je pense qu'il est dans le même cas que moi, mais alors que nous sortons de l'eau pour nous sécher et nous rhabiller, si on peut appeler ces minuscules morceaux de cuirs des vêtements, le silence plane toujours. Un silence qui hurle "je ne sais pas quoi dire alors je me tais". Un silence qui nous suit jusqu'à la sortie de l'oeuvre et lorsque nous posons les pieds dans le Hall de la Zone neutre, lorsque les gens nous regardent de haut en bas, lorsque j'ai l'impression qu'ils lisent nos ébats sur nos traits, ce moment est passé. Finis. Et dans le silence, nous marchons dans des directions différentes. À une prochaine fois? Une prochaine fois peut-être...